J'ai rencontré Wetta à Thionville, il a accepté une interview, il m'a envoyé les réponses par mail (j'ai diffusé cet entretien, début 2008, sur 3 ou 4 forums, je le remets sur mon blog pour ceux qui ne l'auraient pas lu) :
Biaze : Wetta, c’est toi seul "aujourd'hui", ou l’entreprise a grandit ?
Wetta : Je bosse toujours en solo. Si j'ai besoin d'aide, je sous-traite ou je m'associe, mais Wetta reste MA bestiole.
Biaze : Il est loin le temps de Batman/Tarzan. Un bilan ?
Wetta : J'ai l'impression que c'était il y a 10 ans... Depuis, j'ai pas mal évolué. Je maîtrise mieux ce que je fais, remarque c'est pas dur: Avec B/T, j'ai tout appris et appliqué en même temps. Je ne connaissais strictement rien à l'édition lorsque j'ai commencé à bosser dessus, mais je m'en foutais, je savais que j'y arriverai car j'ai toujours réussi à atteindre mes objectifs, quoi que je fasse. J'ai monté le projet, j'ai imposé ma w-box et j'ai vendu tous mes bouquins aux libraires (c'est même moi qui emballait et expédiait les colis, avec l'aide d'un pote!). Depuis, j'ai gardé le même système de fonctionnement pour ce qui est de l'édition, mais désormais la vente passe par C.E.D. (et Legends) et Dilisco s'occupe de la logistique.Je dois avouer que la pause de 2006 a été un bon plan : ça me gavait de publier de bons titres et de me casser les noix à décrocher des licences comme Alien tout ça pour que mon diffuseur estime péter le score lorsqu’il finissait par placer un millier d’exemplaires… Le coup de grâce a été le jour où je leur ai annoncé que j’avais réussi à contourner le contrat entre DC et Panini pour pouvoir proposer des titres Batman et Superman. Leur première réaction a été de craindre un conflit avec Interforum (comme s’ils évoluaient dans les mêmes sphères…). Ce jour là, j’ai arrêté de perdre mon temps et mon fric. J’ai mis Wetta en veille, j’ai commencé par prendre des vacances, puis j’ai cherché un distributeur digne de ce nom et c’est comme ça que mon deal avec Dilisco s’est mis en place. Après la fin de Semic, il leur fallait un substitut pour leur programme B.D. et ils ont signé Wetta, Les Enfants Rouges, Le Cycliste… Ensuite, j’ai pris le temps de préparer correctement ma seconde génération de titres en prenant de l’avance sur les trads, en faisant évoluer le format et la qualité des books… Wetta est revenu en Mars 2007 et les ventes sont entre 40 et 150% plus élevées que par le passé- ça fait une belle fourchette, mais je te donne là les extrêmes… Tu constateras que la moins bonne mise en place est quand même 40% plus forte que par le passé. Bon, c’est pas énorme niveau blé, mais ça me suffit pour en vivre (faut pas oublier que je suis seul derrière) et continuer à me payer les titres qui me plaisent. En plus, ça fait partie de ma politique de publication : Je veux que les titres Wetta se retrouvent dans les bibliothèques de passionnés, de fans, et pas sur les linéaires des supermarchés. De plus, une fois que j’ai bouclé un titre, j’ai tout de suite envie de passer à autre chose et d’ajouter de nouveaux books à mon catalogue. Si un titre est épuisé, je sors éventuellement une seconde édition, mais en prenant mon temps car je veux être parfaitement en phase avec ce que je fais. En gros, il n’y en a PAS pour tout le monde et les books Wetta gardent ce petit côté rare qui me plait, à moi, en tant que collectionneur.
Biaze : A la fête de la bd à Thionville, tu m’as dit vivre à présent de ta passion. Est-ce un combat permanent ou tu es bien rôdé à présent ?
Wetta : Non, maintenant ça roule. C’était difficile au début car, comme dit précédemment, les ventes étaient « assurées » par des types qui s’en battaient les burnes. Une autre équipe a bien repris les choses en main (les ventes, pas les burnes) et tout va bene.
Biaze : Quels sont les trois comics que tu as le plus vendus (à la date d’aujourd’hui)?
Wetta : Aliens Salvation, Batman / Tarzan et AvPvT. Salvation sera peut-être réédité plus tard avec quelques différences par rapport à la première version (à commencer par la couverture, bien sûr) et sûrement une interview de Dave Gibbons (Mike Mignola avait eu le sien dans l’édition 2007). A chaque fois que je le jugerai nécessaire, je ressortirai mes books mais il ne s’agira pas de simples réimpressions. Ce serait flouer les premiers acheteurs (là aussi, je parle en tant que collectionneur).
Biaze : Quels sont les 3 comics qui t’ont le plus rapportés (à la date d’aujourd’hui sachant qu’à présent tes livres les plus récents sont publiés en Chine avec une meilleure marge de profit) ?
Wetta : L’un dans l’autre, Aliens Salvation, Blanche et Aliens vs Predator vs Terminator sont ceux qui m’ont le plus fait gagner d’$.
Biaze : Les titres se multiplient maintenant quels comics ont été des échecs financiers ?
Wetta : Jingle Belle a été une belle plantade. Mais la lanterne rouge c'est Gaturro (remarque, celui-ci c’est pas du comics mais de la BD). Jingle Belle est pourtant un bon personnage et le recueil en question est franchement sympa (y’a Paul Dini aux manettes, quand même !). J’en attendait peut-être trop. J’ai tellement aimé ce comic que je ne me suis pas posé la question de savoir comment il allait être accueilli. Résultat : les critiques étaient bonnes mais le public n’a pas accroché. J’y vois 2 explications : La période de sortie (c’était un peu trop « juste avant Noël ») et les coquilles dans la trad (je parle des merdouilles de frappe), j’ai bossé la trad un peu trop à l’arrache –mes excuses à ceux qui les ont subies- raison de plus pour avoir pris mon temps en 2006.
Biaze : Quels sont ceux qui ont été une déception (genre tu en attendais plus) mais qui n’ont pas été un échec pour autant ?
Wetta : Je dirais bien Patrick petit garou, mais je savais à la base que ce titre était risqué : un éditeur de comics plutôt bourrins comme Hack/Slash et Aliens qui publie de la BD pour mômes… Mais d’un autre côté, ceux qui l’ont acheté pour eux et pas pour leur petit frère ont été conquis par le style graphique d’Art Baltazar. DC l’a d’ailleurs engagé depuis pour sa série Tiny Titans ! Je pensais en vendre un peu plus. Mais les retours d’invendus sont assez rares et en fait, il y a même du réassort sur le premier tome, donc ce semi-échec a peut-être posé les bases d’un futur succès. Batman : Joker / Mask a été en-dessous de ce que je visais. On dit que c’est la période où il est sorti qui a posé problème (les élections présidentielles), je n’étais pas super convaincu, mais ça s’est vérifié avec la sortie de Green Lantern vs Aliens, son titre jumeau (là aussi, un crossover DC déjà sorti quelques années auparavant chez Semic) qui a fait un score largement supérieur alors que Green Lantern est moins populaire que Batman. Remarque, c’est peut-être Alien qui est plus populaire que The Mask.
En tout cas je me suis rarement autant marré sur une trad ! J’ai complètement remanié les textes par rapport à la version Semic et (n’en déplaise à mon prédécesseur) cette version est bien plus fun.
Biaze : Les tirages limités se vendent bien ? Chaque livre que tu publieras y aura droit ou tu sélectionnes ? Si c’est le cas, quels sont les critères pour qu’un comic ait droit à une ou plusieurs éditions spéciales ?
Wetta : Non, je gardes les éditions exclusives pour les titres qui ont le plus de potentiel commercial. Exemple : une version exclusive de Zombie Highway ne servirait à rien, c’est un super titre mais qui va se vendre auprès d’une clientèle assez restreinte. Il n’y a donc pas vraiment d’intérêt à posséder une version exclusive. Par contre, pour un titre qui va super bien se vendre (comme Superman vs Aliens, par exemple), là c’est la frime si tu sors le bouquin en édition exclusive devant ton pote qui s’est payé le bouquin en librairie. « Quoi ? tu achètes tes comics en librairies ? Bouh…. » Ha ha ! Les versions exclusives sont réservées aux lecteurs « aware » qui font leurs courses directement sur le site internet de l’éditeur. Mais, devant les demandes, je crois que je vais céder un petit stock à des librairies vraiment spécialisées. Acheter sur Internet pose encore quelques problèmes pour certains (c’est compréhensible quand on s’est fait rouler).
Biaze : Ghost n’a pas marché en France, pourtant j’ai un bon souvenir du début de la série publié par Semic, n’est-ce pas dangereux de reprendre une série qui a été un échec ? Tu ne publieras que les crossovers ou tu tenteras la série si cela marche ?
Wetta : Je vais commencer par le bien nommé Ghost / Batgirl : Ressusciter qui sortira début 2008, et après j’aimerais embrayer sur un TPB Ghost comme Black October qui était vraiment bien foutu. J’aime beaucoup Ghost, c’est un bon perso et elle a un look hyper sexy. Elle est catalogué « bimbo à la Image », c’est con parce que ce perso offre énormément de possibilités... Certains passages sont vraiment portés sur le sexe, d’une façon assez troublante, ce ne sont pas des démonstrations explicites pour boutonneux en manque, mais des situations assez subtiles comme lorsqu’elle « aide » une copine à s’occuper de son mec. Il faut savoir aussi que sa sœur a joué dans des pornos… Mais, bon, Ghost n’est pas une série de cul. Je la trouve vraiment cool en tout cas, et j’espère pouvoir lui donner une seconde chance en France. Batgirl l’y aidera peut-être. Et, bon, si le danger me faisait flipper, je ne serais pas là…
Biaze : Tu as publié Billy the Kid de Powell, tu le sens bien à présent qu’il est plus connu chez nous grâce à The Goon ou c’est un coup de trafalgar (hormis le potentiel du livre) ?
Wetta : C’était clair que Powell allait bien marcher en France. D’un côté, je suis heureux d’avoir lâché l’affaire sur the Goon et que Delcourt s’en soit occupé : ça aurait été gâcher ce titre, mon diffuseur de l’époque en aurait placé 3 et demi dans les librairies et elle serait passée inaperçue. Et miser tout mon blé sur ce coup… J’ai préféré le claquer sur Alien.Maintenant la série me plait un peu moins. Graphiquement je préférais lorsque ses planches étaient encrées, son dessin s’y prêtait vraiment bien. Niveau scénar c’est un peu moins délire (sauf pour le numéro spécial « Satan’s S*d*** child » qui était vraiment bien barré comme je les aime !), mais ça n’est qu’un avis perso. Billy se rapproche plus de ce que j’attends d’un comic book et les dessins comico-macabres de Kyle Hotz sont vraiment super bons et servent parfaitement l’ambiance « Contes de la Crypte » du récit. Biaze :Tu publies Aliens, et bien qu’un nouveau long-métrage est en préparation, les films ne datent pas d’aujourd’hui ! Kiss est prévu également ! On est loin des vrais fans de comics (X-men, Superman, Spider-man…) ;
Biaze : Tu publies pas mal de Dark Horse en fait , tu vas chercher les amateurs de films ou de musique, c’est un créneau aujourd’hui plus ou moins délaissé ! Je vois (apparemment) que cela marche chez les vendeurs de statues, figurines et autres… Il y a eu une opportunité financière ou une étude de marché démontre qu’il y a une réelle clientelle qui attend dessus ?
Wetta : Les réponses sont dans ta question. Je détaille :AVP2 est sorti en Janvier 2008. Tu sais ce que ça signifie ? Ca signifie qu’Alien, qui est apparu au ciné en 1979 passionne toujours des millions de personnes qui vont continuer a s’intéresser à son univers, qui sont fascinés par sa monstruosité et qui veulent en voir plus sur lui. On met des millions de dollars en jeu dans le tournage d’un nouveau film sur cette créature et on produit des jeux-vidéos, des figurines et des comics parce que le concept a beau atteindre la trentaine, il n’en demeure pas moins passionnant ! Je passe sur les bitos qui prennent ça au vol, qui n’ont pas vu la moitié des films de la saga et qui te sortent une connerie du style « Tintin contre Godzilla » lorqu’ils entendent parler d’Alien vs Predator… C’est lourd, ça fait plus marrer personne, et franchement après près de 35 ans de crossovers (« Superman / Spider-man » a été le premier, je crois) faut vraiment l’avoir étroit pour être encore effaré par le concept.Entre ceux qui décrètent 6 mois avant la sortie d’un crossover que ce sera de la merde et ceux qui en attendent le récit ultime qui va les laisser sur le cul et leur faire oublier Watchmen, les crossovers se traînent un tas de préjugés qui paraissent bien cons une fois qu’on connaît les faits. A la base, les crossovers partent de fantasmes de geeks (les comptables ont compris depuis un bon bout de temps que financièrement, avoir 2 têtes d’affiche ne change pas grand chose). Mais ils sont trop souvent accueillis de cette façon : ce sont des produits destinés à faire du fric et c’est fait à la chie dedans, sans talent ni ambition. Faux. Ca ne manque pas d’ambition, mais simplement de prétention : Un crossover n’a d’autre prétention que de réunir deux séries pour faire évoluer ensemble deux persos qui n’auraient jamais pu se croiser. Ca me fait toujours mourir de rire quand je lis dans la critique d’un crossover : « le scénario est banal ». Que le scénario ne soit pas plus mauvais que n’importe quel épisode de la série régulière n’est pas important, celui d’un crossover sera toujours jugé « banal »... Sans doute on attendait-on trop ? Quand bien même le scénario est malin et même meilleur que celui d’un épisode classique, on le qualifiera de « plutôt pas mal pour un crossover », sous-entendu « je m’attendais à une méga grosse merde parce que dans mon esprit étriqué j’ai du mal à comprendre qu’un crossover n’est qu’une BD pas plus conne qu’une autre où l’un des protagoniste est aussi la vedette de sa propre série, mais ce bouquin va à l’encontre de mes préjugés et j’ai un peu peur de passer pour un gol si je dis qu’en fait il est bon. »…Ensuite, va dire à Dave Gibbons qu’il ne sait pas écrire et aux frères Kubert qu’ils dessinent avec leur pine… C’est en gros ce que tu fais lorsque tu craches sur Batman vs Predator. Je prends cet exemple car c’est le plus parlant, tous les crossovers n’ont pas de pointures à la barre mais en condamnant les crossovers en général, on condamne un tas de books super bien foutus qui ont le tort, aux yeux des branleurs suffisants qui les jugent sans les avoir lus, de réunir deux persos connus pour eux-même dans la même histoire. Qu’est-ce qui les perturbe, ces mecs ? Que Batman croise un extra-terrestre ? C’est pourtant régulier pour lui, depuis plusieurs décennies. Superman est lui-même un extra-terrestre, tout comme le Martian Manhunter qui font partie aux côtés de Batman et Flash, de la Justice League ! Alors c’est quoi le problème au juste? C’est quand même marrant : on parle de comics, de ciné fantastique, des univers liés à l’imaginaire, et pourtant on se pose des barrières stupides, ça donne lieu à des réflexions crétines du genre « c’est pas crédible ». Mais putain, on te parle de COMICS et de FANTASTIQUE, qu’est-ce que tu viens nous prendre la tête?! Tu estimes savoir mieux que leurs auteurs ce qu’une série peut instaurer ou pas dans sa logique ? Ca rejoint les réactions sur AVP2 qui se passe sur Terre et va mettre en scène l’hybride « predalien » (créé dans le comic book AVP en 1993), les mecs qui s’expriment sur le sujet (remarque, on s’exprime rarement sur les choses qui nous plaisent) trouvent l’idée débile et grotesque. Qu’est-ce qui est grotesque ? Qu’une larve extra-terrestre grandisse en parasitant le corps d’un hôte et hérite de ses caractéristiques physiques ? Dans ce cas, c’est tout le concept d’Alien que tu trouves débile, alors casse-toi et va voir ailleurs… Ce qui me fait pitié, c’est que si AVP2 se passait de l’hybride et se déroulait dans l’espace, les mêmes types auraient déclaré que le film n’apporte aucune nouveauté et qu’il ne s’agit que d’une redite… Je pense donc que ces types n’aiment tout simplement pas le sujet, et je me demande pourquoi ils se torturent à vouloir à tout prix se taper ces films...J’ai souvent entendu des réactions négatives sur AVP, la critique la plus récurrente porte sur l’alliance Predators/humains du film. Tu la vois où, exactement, cette alliance ? Les humains se font défoncer par les Predators et il n’a jamais été question pour les crabes de les épargner. Ce sont des proies, des trophées qui leur permettront de gravir les échelons sociales dans leur civilisation. Le récit avance et une femme humaine réussit à tuer un Alien. Cet acte la rend égale au Predator « Scar » qui est obligé, selon les lois de sa race, à la considérer comme égale à lui-même. C’est donc logiquement que cette femme est acceptée par les Predators. Mais, pour comprendre ça, il faut connaître les bases des univers Alien et Predator, et ça échappe aux types qui prennent ça au vol et qui n’acceptent même pas ce que le premier niveau de lecture que le film leur propose (« L’ennemi de mon ennemi est mon ami »). Bref…Un crossover demande un minimum d’implication de la part de son lecteur qui doit se servir de ses connaissances sur les univers mélangés pour savourer pleinement le récit plutôt que de se laisser guider de bout en bout par un récit classique.C’est peut-être ce que j’aime vraiment dans le concept…Perso, je publie des crossovers parce que c’est ce que je préfère dans les comics. Je suis à fond dedans, j’aime ça, je trouve ça cool de voir Batman et Judge Dredd ensemble, de voir Darkseid utiliser les Aliens comme arme biologique, de voir les Predators faire la guerre à des hybrides Aliens/Terminators… Et vu les résultats des ventes, je dois pas être le seul ! Je conseille donc à ceux qui n’aiment pas « ça » de se contenter de lire les séries régulières, où Superman affronte des extra-terrestres qui ne s’appellent pas « Alien » ou « Predator » et de foutre la paix aux amateurs de ce genre de récréations, de juger les livres sur leur contenu (et après les avoir lu, car ce serait plus constructif, je pense…) Bon, j’arrête avec AVP et les crossovers—Ensuite, de quoi me parlais-tu ? ah ! KISS ! Tu sais, je suis un fan absolu de cet incroyable groupe ! Pour moi, c’est le meilleur groupe de rock de l’histoire, bien au-dessus des Beatles ou des Stones. Il y aura toujours un pelé pour te dire que leur maquillage ne sert qu’à dissimuler un manque de qualité musicale (dans ce cas explique-moi comment ils approchent les 40 ans de carrière ?), ce même pelé n’ayant jamais écouté la moindre note d’une de leur chanson… C’est dingue ce raisonnement qui conclu qu’un bon look est forcément gage de médiocrité… C’est comme les filles : Si c’est une nana canon, blonde à gros nichon, elle doit forcément être conne. Si c’est une fille moche, elle est forcément intelligente et sensible. Pourtant, je croise tous les jours des thons moches comme des poux et connes comme des prunes ! A l’inverse, je connais pas mal de filles super bonnes et bien dans leurs têtes. Je conseille à ces types d’écouter Within, Domino, 100 000 years ou encore Creatures of the night (ce n’est qu’un misérable échantillon de leur discographie) et de revenir me parler après. Bien sûr, le style KISS ne peut pas plaire à tout le monde, mais en entendant ces titres, on ne peut nier leur talent sans faire preuve d’une honteuse mauvaise fois. Allez, tapez vous I was made for lovin’ you version Alive III, ça va vous faire tout drôle !Lorsque j’ai vu que KISS fondait KISS COMICS GROUP, j’ai sauté au plafond ! Il n’y avait qu’un seul éditeur qui pouvait s’occuper correctement de ce projet en France : moi, et quand j’ai eu le feu vert de Gene Simmons, crois-moi que j’ai sorti le plus gros barreau de chaise que j’ai jamais crapoté de ma vie ! Publier les KISS Comics, c’est mon hommage au groupe, ma façon à moi d’entrer dans la Kisstory. Semic avait tenté le coup à l’époque avec les premiers KISS Psycho Circus, mais ils s’y sont pris comme des mémés : ils ont sorti ça en kiosque (alors que c’était fait pour les librairies) et même moi je n’étais pas au courant que ça sortait. C’est pour ça que j’ai mis Hard Rock Magazine et Diamant Noir sur le coup. C’est dans la même logique que j’ai monté les partenariats avec L’Ecran Fantastique pour AvPvT, Superman vs Aliens… C’est tellement logique ! Pour ce genre de comics, c’est là que ça se passe. Si tu t’intéresse à KISS ou à Alien, qu’est-ce que t’en as à secouer des magazines de BD ? D’ailleurs si tu t’intéresse au rock et au ciné, tu traînes dans les librairies ? Ben, non… Les comics tirés de films ou inspirés par les groupes de rock n’avaient jamais vraiment marché en France parce que les éditeurs qui s’en occupaient n’ont jamais su comment se débrouiller avec. C’est pour ça que lorsque j’ai annoncé la série Aliens on me prédisait un ratage, mais on se basait sur ce qui avait été fait en France, avant. Moi, le public BD ne m’intéresse pas, c’est le public ciné que j’ai visé, et ça a marché. Les « movie-comics » marchent bien de mon côté parce que je sais de quoi je parle, je suis un vrai fan des films concernés et je sais comment j’aimerais voir leurs adaptations BD exposés en tant que fan.Pareil pour KISS. C’est voir KISS 4K en couverture d’Hard Rock Magazine qui me fait bander, pas un article dans Bodoï…Et puis il y a aussi le syndrome des adaptations ciné-BD, qui par le passé ont brillé par leur inutilité car elles se contentaient (et encore…) de mettre en cases ce qu’on voyait sur grand écran.Aliens a balayé tout ça en développant à fond l’univers instauré sur pellicule pour l’amener beaucoup plus loin, Dark Horse a pris les Aliens et en a réellement fait des personnages de comics à part entière. Depuis, la majorité des movie-comics a au moins essayé de suivre ce brillant exemple (vas-y, ouvre un album Star Wars…), ils n’ont pas toujours atteint cet objectif, mais tu te retrouves enfin avec un véritable prolongement du ciné en B.D.C’est un genre qu’on avait laissé de côté en France, un pays où, jusqu’à la moitié des années 90, on jugeait le cinéma asiatique par les films de kung-fu de 3ème zone des années 70, tu me suis ? On met une étiquette sur des trucs et on évite soigneusement de revoir son jugement. Une fois qu’on a collé une étiquette ou jugé quelque chose, on pense que ça n’évolue pas et on laisse courir. C’est comme ça qu’on passe à côté d’un tas de choses jusqu’à ce que quelqu’un te foute un coup de pied au cul pour te déconstiper… Tiens, tu as vu ? Panini a sorti 28 Jours plus tard en comics
En ce qui concerne le public comics, tu as vu juste. Il ne m’intéresse pas. J’ai même un gros problème avec une bonne partie de ce public (du moins, celle qui s’exprime sur internet) qui est devenue hyper sectaire, et ça, ça pue. Les mecs en sont même à sélectionner leurs bouquins par rapport à leur éditeur V.F. ! C’est quoi cette histoire, franchement ? Tu aimes un bouquin en V.O., mais si y’a écrit Delcourt à la place de Panini, du coup c’est à chier ?? C’est n’importe quoi. Un bouquin me plaît par son sujet et son contenu. Je fais déjà rarement gaffe à ses auteurs, alors à son éditeur V.F… Pour certains ça tourne à l’obsession, je te jure ! Au moins, dans le public ciné et rock, on se tape de savoir si il y écrit Toth, Wetta ou Bamboo en bas de la couverture, tant que le livre s’appelle KISS 4K ou Destination Finale. Et puis ça devient lourd de lire des types qui s’auto-proclament experts en comics alors qu’ils ont commencé à en lire il y a 6 mois…Je fais un rejet en ce moment, moi aussi. Je me mets à l’écart du lectorat de comics français parce que je n’adhère pas du tout à ça, et les titres Batman ou Superman que je publie sont ceux qui me plaisent et qui plairont aux cinéphages, pas aux puristes qui disserteront des heures sur la couleur du soutif de Mary Jane dans le Spiderman de Mai 1987 et qui de toute façon, on l’aura bien compris, trouvent les crossovers minables.-minute, je reviens en arrière pour relire tes questions-ok. Opportunité financière pour les movie-comis ? Oui, d’autres l’ont bien senti aussi (Panini a sorti 28 jours plus tard en comics, je l’ai déjà dit ?…). Et les études de marché, c’est pour les grosses boîtes, ça ! La seule étude de marché que je fais se passe dans ma tête : « alors, Fred, ce book te plaît ? Oui ? Non ? Ok ! » et de là, je le publie ou pas !
Biaze : Quel question aurais-je omise, que tu aurais aimé que je pose ?
Wetta : Oui, style « Fred, qu’est-ce que tu vas nous mettre en 2008 ? » et là, je te réponds : Wetta et Mad Movies se sont associés pour créer Mad Movies Comics, un label qui va regrouper les collections ciné/comics de Wetta comme New Morgue et Aliens, vous allez aussi pouvoir lire certains titres Wetta en pré-publication dans le magazine L’Ecran Fantastique, et les KISS Comics vont enfin avoir droit à une vraie collection, celle que les fans attendaient depuis des décennies ! Surveillez de près les sorties de Zombie Highway 2 et préparez-vous à une claque avec J’enterre mes sandwiches, une b.d. dérangeante, poétique et fascinante qui parle d’anorexie. C’est un pote de Songgu Kwon (Blanche) qui l’a signée… Tu vois le genre !?
Biaze :Merci Fred, à une prochaîne fois !
Wetta : Merci à toi ! au plaisir
mardi 14 octobre 2008
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